La foule

Pourtant, il m’arrive encore de rêver, de voir et de vivre des histoires comme je les aime pendant mon sommeil. Je trouve que c’est un luxe que je ne mérite pas. Je devrais, pendant que je dors, regarder comme ça bêtement les gens qui vont et qui viennent dans tous les sens. De la terrasse de mon café habituel, sous mes lunettes noires continuer mon observation de la fourmilière humaine. Et comme toujours poser mes questions lancinantes de tous les jours…Qu’est ce qui peut bien motiver cette foule ? Quelle électricité l’ébranle à se mouvoir de cette manière ? A quoi rêve-t-elle ? A quoi aspire-t-elle?

Et enfin la question cardinale : pourquoi n’en fais-je pas partie ? Oh combien je voudrais fondre dans cette foule et n’en plus ressortir. Faire partie de ce bloc solide qui, inlassablement, va et vient et vit simplement, « ordinairement ». Oui, oublier ma personne, mes idées, mes aspirations, mes ambitions, m’en décharger définitivement tel un homme qui se déshabille pour plonger tout nu dans un hammam à l’eau brulante. Rompre cette solitude qui m’inocule chaque jour une goutte de poison. Comme je serais heureux de pouvoir rire comme ces gens qui passent devant moi, alourdis par des sacs pleins à craquer, pour une histoire ridicule dénuée de tout esprit. L’art, la littérature, la poésie, la philo, la politique, les grandes questions de l’heure….mais qui se soucie encore de toutes ces histoires ? Même les journaux s’en moquent bien ! Ces questions ne sont plus de leurs attributs !

L’essentiel, comme le pense la foule, c’est le football, la chanson préfabriquée à la libanaise, quelques clips débiles et le dernier téléphone portable à la mode…