Le journal d'un tunisien ordinaire(4)

Auguste Durel (café des platanes)

Ton bureau se situe quelque part à la rue d’Angleterre. A quelques centaines de mètres de la gare. Tu aimes beaucoup cette rue. Tu la trouves particulièrement belle et animée. C’était dit-on la rue des libraires et des maitres relieurs. D’ailleurs jusqu'à nos jours elle abrite le nombre le plus important de bouquinistes et autres commerces de bureautique. Tu regrettes chaque matin de voir l’illustre café des platanes fermé. Il t’arrive parfois de te dire que tu aurais aimé faire partie de ces gens du début du siècle dernier et de prendre une bière de bon matin en compagnie des français, maltais, italiens, espagnols… Les rideaux en acier poussiéreux touchant le sol te rappellent que les temps ne sont plus les mêmes. En face du café clos se dresse la majestueuse bâtisse qui abrite la poste centrale. Tu ne peux t’empêcher chaque matin de la caresser du regard. Tu te dis qu’un jour viendra où tu chercheras à trouver le nom de son architecte. Au niveau de la rue Charles De Gaulle tu t’arrêtes quelques minutes afin de laisser un groupe de jeunes lycéens bruyants traverser la chaussée. Tu les regardes avec amour et admiration. Tu les trouves vifs et gais. Pendant quelques instants ils te communiquent un sentiment de bonheur. Grace à eux la vie continue. Quelques pas plus loin tu te trouves en face des « montagnes » de livres que le premier bouquiniste a pris le soin de ranger sur le trottoir dès le matin. Comme attiré par le papier imprimé tu t’arrêtes comme chaque matin pour prendre au hasard quelques livres que tu feuillètes comme ça sans but précis. Tu te dis souvent que n’eussent été les bouquinistes tu n’aurais jamais pris un bureau dans cette rue.