Le journal d’un tunisien ordinaire (6) et fin

Je ne suis plus d’humeur à continuer d’écrire ce journal du tunisien ordinaire. Je compte oublier ce personnage pour un moment. Il restera là à m’attendre dans un fichier sur mon ordinateur. A quoi bon s’entretenir avec lui en ce moment après ce qu’il vient de subir. Je le connaissais un peu morose et mélancolique mais voilà qu’il devient aigri et a tendance à devenir agressif. Je ne lui en veux pas. Je sais pertinemment qu’il vient de passer quelques semaines affreusement douloureuses. Il a été secoué dans tous les sens. Il a été blessé au plus profond de son âme et de son esprit. Il vient de se sentir si petit et si inutile que même les journées les plus lumineuses de Tunis perdaient leurs couleurs et leur éclat et n’arrivaient plus à lui communiquer cette joie de vivre. Il a senti que tout ce qui l’entoure est hypocrite, faux, malsain …Il a compris qu’on le prenait tout simplement pour un demeuré mental éligible à un séjour dans un asile psychiatrique. Ce qui le touche le plus est ce message sibyllin qu’il est particulièrement impuissant et par conséquent il doit continuer son chemin comme les autres le lui ont bien tracé. Les affiches et les pancartes qui remplissent les grandes places, les avenues et les rues sont pour lui autant de gifles et d’insultes en plein visage. C’est tout de même bizarre la force d’agression que renferme une simple pancarte que le vent s’amuse à faire à balancer au dessus des automobiles.